QUAND LES MARQUES DE LUXE OUVRENT LEUR PATRIMOINE A L’UPCYCLING
Dans le secteur du retail, les grandes maisons du luxe, mais pas seulement, commencent à envisager une valorisation des décors et vitrines, au travers de l’upcycling des matières et produits délaissés, afin de créer des objets inédits qui peuvent à leur tour entrer dans les collections. RES’ART, Ré-enchantement, La Fabrique Singulière : au cœur de ce nouvel écosystème créatif qui accompagne les marques dans leurs démarches, on retrouve des collectifs, associations et artistes, qui font travailler des artisans d’art français chargés de réaliser la création de ces œuvres qui offrent une seconde vie au patrimoine des grandes maisons.
Photo 1 : ©Louise-Cagani-La-Fabrique-Singuliere / Photo 2 et 3 : petit-h-©hermes
Et si les vitrines retail imaginées par les plus grandes maisons du luxe pour mettre en valeur leurs produits trouvaient le chemin d’une seconde vie permettant de valoriser à la fois le patrimoine des marques et les savoir-faire des artistes et artisans français ? C’est la suggestion avancée récemment par Marie Reynaud, directrice du développement et du marketing de l’agence de design Lonsdale, dans un post publié sur LinkedIn « Les décors de vitrines et autres installations des marques de luxe, dont certaines sont des trésors de minutie, de craft et d’attention aux détails, devraient-ils être archivés dans un musée ? » s’interroge-t-elle. Et de poursuivre : « Ne pourrait-on pas en offrir à des écoles, pour nourrir l’imagination des enfants et inspirer leur créativité ? ».
Une idée qui a déjà commencé à germer dans l’esprit de certaines marques de luxe… et dans les musées. En témoigne l’exposition que le Grand Palais avait consacré en 2017 aux vitrines Hermès créées par Leila Menchari. Plus récemment, des associations et collectifs réunissant entreprises, artistes et artisans d’art ont fait avancer le mouvement. Notamment la Fabrique Singulière, créée en 2020 et qui travaille avec des artisans comme la plasticienne Louise Cagani, la vannière Marie Drouet ou la couturière Sophie Inard, pour manufacturer des objets sur-mesure et uniques, qui reflètent les valeurs des clients.
RÉINVENTER ET RESPONSABILISER…
C’est aussi dans cette optique de circularité qu’a été créée, en 2021 au sein du groupe Elba, l’association à but non lucratif RES’ART. Soutenue par les acteurs du retail, au premier rang desquels les marques, distributeurs et architectes, l’association collecte des matériaux et décors issus du secteur du luxe, afin de proposer à de jeunes designers, artistes, écoles d’art, ou même particuliers, une alternative responsable et engagée au recyclage traditionnel. « Au sein du groupe Elba, nous sommes effectivement sur ces problématiques de fin de vie depuis quelques temps, et redéfinissons ainsi les notions de valeur, de temps, de patrimoine et les paradigmes dont le monde de demain a profondément besoin », explique Coralie Bergdoll, directrice de la prospective, de l’intelligence responsable et des stratégies.
L’upcycling, c’est également l’histoire de l’atelier « Petit h » d’Hermès qui, depuis 15 ans, récupère les chutes et les matières inutilisées par les autres ateliers de la marque (soie, cuir, tissu, porcelaine, cristal, pièces d’orfèvrerie) pour en faire des objets inattendus, nés de l’imagination d’artisans, artistes et designers.
… RÉENCHANTER ET DONNER DU SENS
C’est enfin le très beau projet de l’association à but non-lucratif Ré-enchantement, qui récupère les scénographies des vitrines des points de vente des maisons de luxe et des défilés de haute couture, afin de les réinstaller dans des lieux qui accueillent des personnes vulnérables. « La proximité de la beauté, un accès facilité au beau, la confrontation avec la création artistique qui jaillit à profusion des maisons de luxe, sont de nature à panser les plaies physiques, psychiques et émotionnelles des plus fragiles d’entre nous. C’est dans cet esprit que Ré-enchantement recueille les éléments fastueux et poétiques qui servent d’écrin aux collections des maisons de luxe et les réemploie pour embellir l’aménagement et la décoration des lieux où sont reçues les personnes qui sont les plus éloignées du sentiment d’évasion et de légèreté que procure la contemplation de la beauté », précise l’association. Une seconde vie qui participe au mieux vivre de personnes vulnérables : voilà un upcycling qui gagne sur tous les tableaux.